Monument à la gloire du Génie aux Eparges
« L’élévation d’un monument « A la gloire du génie » ne pouvait trouver lieu plus symbolique et cadre plus recueilli. Ce doit être la fierté des sapeurs lorrains d’avoir réalisé et de continuer à entretenir ce site. »Général Rigoux, Président de la Fédération Nationale du Génie, le 3 octobre 2010
Les Eparges, un point culminant
Dès l’automne 1914, le front s’établit aux abords de la crête des Eparges. Véritable promontoire, les Allemands s’y installent car la crête offre un observatoire très avancé dans la plaine de la Woëvre au sud de Verdun.
La reconquête de ce point haut par l’armée française est fixée au 17 février 1915. La mission est confiée à la 12ème division d’infanterie, dans laquelle sert l’écrivain Maurice Genevoix. Engagé aux Eparges de février à avril 1915, il y est grièvement blessé et livrera après guerre des témoignages poignants de ces années de conflit.
L’opération permet de récupérer la partie Ouest de l’éperon : le point C. Les troupes françaises défendent leurs nouvelles positions au prix de nombreuses pertes. Cette avancée est jugée incomplète par l’Etat Major car seule la partie Est de la crête offre des vues sur la vallée de la Woëvre : c’est le point X. D’autres offensives sont délivrées au mois de mars 1915 mais elles ne permettent aucun progrès notable.
Le point X, inaccessible pour les Français
A partir du point C, l’armée française tente, début avril 1915, de reprendre le point X aux Allemands qui ont organisé de leur côté un réseau de tranchées et construit des blockhaus.
Sans pouvoir l’emporter au point X, le terrain est abandonné puis repris au gré des attaques et contre-attaques. Malgré la combativité des combattants français, les Allemands restent accrochés au versant Est de la crête. Le commandant en chef Joffre décide alors de mettre un terme aux attaques massives et sanglantes.
Monument du Point X
La guerre change alors de visage à partir de la mi-avril 1915. Le général Herr ordonne de déloger les troupes allemandes par des charges explosives souterraines. Le Génie est chargé de creuser une douzaines de sapes sous le flanc nord de la crête. La guerre des mines commence aux Eparges et chacun des deux ennemis prend alors successivement et provisoirement l’ascendant l’un sur l’autre. Cette guerre ne permettra aucun gain territorial et les pertes sensibles sont quasi-identiques dans les deux camps : environ 50.000 hommes de chaque côté.
« A la gloire du génie »
Œuvre de l’architecte messin E. Fagnoni, le monument commémoratif à la gloire du génie rend hommage aux soldats de la guerre souterraine aux Eparges dont les terribles cratères et entonnoirs restent visibles.
Erigé en 1963 par la section de Metz de la « Société mutuelle des anciens du génie et des transmissions de l’Est de la France » créée à Nancy en 1889, il est dédié aussi aux sapeurs français de tous les temps, de toutes les guerres et de toutes les spécialités du Génie.
A l’origine, le monument du génie devait être installé à Verdun, près de la Porte Chaussée. Une souscription nationale est lancée dans les années 30 par l’« Association du monument du génie » et un timbre est émis en 1939 avec une surtaxe de 50 centimes pour permettre l’érection du monument.
La construction du monument est interrompue par la Seconde Guerre mondiale et sera achevée en 1963. Le mémorial est finalement installé aux Eparges, haut lieu du génie militaire français pendant la Première Guerre mondiale. L’inauguration, le 20 octobre 1963, était placée sous la présidence de M. Messmer, Ministre des armées, du Général Massu, gouverneur militaire de Metz commandant la 6ème Région militaire et représentant M. Sainteny, Ministre des anciens combattants, et de M. Chazal, Préfet de la Meuse.
Tous les ans, le premier dimanche d’octobre, les anciens du génie et des transmissions rendent hommage aux troupes et services du génie en organisant un pèlerinage.
Sept colonnes pour sept spécialités
Le monument, en granit, élevé à la mémoire des sapeurs qui subirent de lourdes pertes durant la guerre des mines se trouve sur un socle pavé.
Le double mur semi-circulaire et ses sept palplanches font référence aux tranchées et autres galeries aménagées par les soldats du Génie pendant quatre années de guerre de position. D’un côté du mur, un texte rappelle la dédicace « A la gloire du Génie » et, de l’autre l’emblème du Génie.
Les sept colonnes qui s’élèvent au dessus du socle symbolisent les différents corps du Génie. Elles désignent :
- les aérostiers : ils pilotent les aéronautes durant la Grande Guerre. Ces ballons militaires servaient à acheminer le courrier et étaient aussi des postes d’observations ;
- les artificiers : ils ont la tâche, avec l'aide d'explosifs, d'empêcher la progression de l’ennemi. Ils doivent aussi désamorcer et neutraliser les charges ennemies ;
- les chemins de fer : cette spécialité permet de construire des voies ferrées pour relier les champs de bataille à l’arrière front ;
- les électromécaniciens : ils sont les spécialistes chargés de fournir le courant électrique dans les camps et les forts. Ils sont sollicités sur toutes les installations utilisant l'énergie électrique.
- les pontonniers : ils sont chargés de mettre en place sur des cours d'eau (fleuves, rivières, ...) des ponts afin de permettre leur franchissement par les armées ;
- les sapeurs-mineurs : ils ont une double fonction, réaliser les travaux de sape ou de tranchée mais aussi creuser des ouvrages souterrains permettant de renverser les positions ennemies à l'aide de mines et de contre-mines ;
- les télégraphistes : ils s’occupent de la téléphonie et de la télégraphie militaire. Ils permettent de transmettre l’information entre les unités militaires. Avant la création de l'Arme des Transmissions, le Génie avait à charge la formation et la gestion des futurs sapeurs-télégraphistes.
Ces sept spécialités reflètent la devise du Génie : « Parfois détruire, souvent construire, toujours servir ».
Par Jean-Bernard LAHAUSSE et Romain SERTELET